Sur l’excellent blog L’école des soignant.e.s du Dr Marc Zaffran / Martin Winkler
” La différence entre Dieu et un médecin, c’est que Dieu ne se prend pas pour un médecin. “
Et si, pour indiquer que la relation de soin est incompatible avec la soumission au médecin, on se réappropriait un texte symbolique très ancien (les dix commandements) pour le métisser avec le (discutable) serment d’Hippocrate et en faire un manifeste de l’autonomie des patient.e.s et de leur liberté d’exercer des choix ? Un texte qui décline les attentes des patient.e.s et qui définit, par conséquent, les obligations des soignant.e.s.
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1° Je suis patient.e et néanmoins ton égal.e, et je te choisis pour me soigner.
En échange de ma confiance, tu assumeras la responsabilité de mes soins avec loyauté. Car je n’ai pas besoin d’une relation de pouvoir, mais de soutien, d’assistance et de partage.
2° Pour me soigner au mieux, physiquement et moralement, tu mettras en œuvre ton savoir, ton savoir-faire, ton intelligence et ton humanité ; tu prendras garde, en tout temps, à ne pas me nuire.
3° Tu respecteras ma personne dans toutes ses dimensions, quels que soient mon âge, mon genre, mes origines, ma situation sociale ou légale, ma culture, mes valeurs, mes croyances, mes pratiques, mes préférences. Si tes valeurs te semblent trop éloignées des miennes pour que tu sois prêt à me soigner, tu ne m’empêcheras pas, mais tu m’aideras par tous les moyens à trouver les soignant.e.s dont j’ai besoin.
4° Tu seras confident.e et témoin de mes plaintes, mes craintes et mes espoirs sans jamais les disqualifier, les minimiser, les travestir, les museler, les divulguer sans mon accord ou les utiliser contre moi. Tu seras mon interprète et porte-parole, tu parleras en mon nom et à ma demande, mais non à ma place. Tu ne me soumettras pas à des interrogatoires inquisiteurs et tu ne me bâillonneras pas.
5° Tu partageras avec moi, sans réserve et sans brutalité, toutes les informations qui me concernent et dont j’ai besoin pour comprendre et supporter ce qui m’arrive, pour faire face à ce qui pourrait m’arriver. Tu répondras patiemment, précisément, clairement, sincèrement et sans restriction à toutes mes questions ; tu ne me cantonneras pas au silence, tu ne me laisseras pas dans l’ignorance, tu ne me mentiras pas.
6° Tu m’aideras à prendre les décisions qui me concernent, en m’informant et en me guidant au mieux. Tu n’entraveras jamais ma liberté par la menace, le chantage, le mépris, la manipulation, le reproche, la culpabilisation, la honte, la séduction. Tu ne me tromperas ni sur tes compétences ni sur tes limites. Tu n’abuseras pas de moi.
7° Tu m’assisteras non seulement face à la maladie, mais aussi face à tous ceux qui pourraient profiter de mon état – tout particulièrement s’il s’agit d’autres professionnel.le.s de santé. Tu ne seras ni leur complice, ni leur obligé.e. Et tu refuseras que quiconque – même moi – t’achète ou t’utilise.
8° Tu m’aideras à lutter contre les injustices qui m’empêchent de recevoir des soins, tu respecteras et feras respecter les lois qui me protègent. Tu te tiendras à jour des connaissances scientifiques et des savoir-faire libérateurs ; tu lutteras contre les obscurantismes.
9° Tu traiteras avec le même respect toutes les personnes qui me soignent, et tu travailleras de concert avec elles, quels que soient leur statut, leur formation, leur mode d’exercice. Car j’ai besoin de soignant.e.s qui travaillent ensemble, et non de volontaires ou de professionnel.le.s aliéné.e.s par la hiérarchie ou les luttes de pouvoir.
10° Tu défendras ton idéal du soin et tes conditions de travail et ceux de tou.te.s les autres soignant.e.s. Car j’ai besoin de soignant.e.s que la société respecte et gratifie pour leur engagement et leur compétence, et non pour leur “rentabilité”.