La Haute Autorité de santé (HAS) publie un premier volet de recommandations définissant la vie intime, affective et sexuelle et posant des repères juridiques, éthiques et organisationnels à destination des professionnels, des personnes accompagnées et de leur entourage.

La Haute Autorité de santé (HAS) publie un premier volet de recommandations définissant la vie intime, affective et sexuelle et posant des repères juridiques, éthiques et organisationnels à destination des professionnels, des personnes accompagnées et de leur entourage.

Changer de regard sur la vie intime, affective et sexuelle des personnes en ESSMS pour mieux les accompagner

Composante de la dignité humaine, la vie intime, affective et sexuelle doit être respectée. Elle concerne l’intimité, les émotions, les sentiments, les relations ou encore la vie sexuelle ou l’absence de vie sexuelle.

Certaines personnes souhaitent être accompagnées parce qu’elles ont besoin d’information ou de soutien. Il en va de leur épanouissement personnel et social et donc de leur santé. Chez les personnes vulnérables, comme les mineurs et majeurs en situation de précarité, de handicap ou encore les personnes âgées en perte d’autonomie, cet accompagnement se révèle particulièrement nécessaire.

Plusieurs difficultés sont rencontrées au sein des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS) : le sujet est nié voire tabou, les professionnels sont souvent isolés et manquent de formation pour l’aborder, la vie en collectivité introduit des contraintes…

La Haute Autorité de santé (HAS) publie un premier volet de recommandations définissant la vie intime, affective et sexuelle et posant des repères juridiques, éthiques et organisationnels à destination des professionnels, des personnes accompagnées et de leur entourage.

François CROCHON, sexologue clinicien, Directeur du CeRHeS a participé à l’élaboration de ces Recommandation des Bonnes Pratiques Professsionnelles.

« Les personnes âgées n’ont pas de sexualité », « Parler de sexualité avec les jeunes risque de les inciter à avoir des relations sexuelles et à faire face à une augmentation des grossesses ou des infections sexuellement transmissibles », « Parler de vie intime, affective et sexuelle, c’est parler uniquement de génitalité et de reproduction »… 

Autant d’idées reçues, notamment au sein des établissements et services sociaux et médico-sociaux (ESSMS). Des difficultés sont en effet identifiées concernant l’accompagnement de la vie intime, affective et sexuelle des personnes dans les secteurs de la protection de l’enfance, du handicap, de l’inclusion ou des personnes âgées en perte d’autonomie.

La vie intime, affective et sexuelle peut être mal comprise voire passée sous silence par les professionnels (éducateurs, psychologues, infirmiers, gériatres…), les personnes accompagnées (mineurs, adultes) et leur entourage (familles, aidants, mandataires judiciaires), une situation susceptible d’entraîner des frustrations et des souffrances. Les professionnels témoignent également d’un sentiment de gêne et d’illégitimité à aborder la question, mais aussi d’un manque de formation.


Le respect de la vie intime, affective et sexuelle constitue une dimension essentielle du bien-être, que l’on parle de sentiments, de pratiques sexuelles, avec ou sans lien affectif, ou encore du rapport au corps et à l’autre. Plusieurs études confirment les bienfaits de la vie intime, affective et sexuelle sur la santé physique et mentale et sur la qualité de vie. Sa prise en compte chez les personnes en situation de vulnérabilité apparait ainsi particulièrement importante afin d’articuler respect de leurs libertés et droits, accompagnement vers leur autodétermination et développement de leur pouvoir d’agir.

La HAS publie un premier volet de recommandations¹ pour accompagner la vie intime, affective et sexuelle des personnes accueillies dans les ESSMS. L’objectif est de promouvoir une approche positive en fournissant aux professionnels des repères scientifiques, éthiques et organisationnels et leur permettre ainsi de comprendre et de tenir compte des aspirations des personnes accompagnées. La HAS insiste particulièrement sur l’importance du portage institutionnel et sur l’équilibre à trouver entre accompagnement et respect de la vie privée et de l’intimité. Elle enrichit également ses recommandations de retours d’expériences et de pistes d’actions.

S’engager pour la vie intime, affective et sexuelle au niveau institutionnel

La prise en compte de ce sujet passe par l’impulsion d’une dynamique par la gouvernance des établissements et services. C’est pourquoi la HAS recommande l’inscription de la vie intime, affective et sexuelle dans une réflexion institutionnelle globale, se traduisant dans les différents outils existants tels que les projets de services ou d’établissements, le livret d’accueil ou encore le règlement de fonctionnement. Cette formalisation vise à recommander des postures et pratiques communes et à engager de façon durable l’ensemble des acteurs, jusqu’à la direction.

Les prises de paroles doivent être encouragées, tant du côté des professionnels que des personnes accompagnées. Des temps d’échanges entre professionnels peuvent être mis en place et la désignation d’un référent vie intime, affective et sexuelle ou l’appel à des intervenants extérieurs peuvent s’avérer aidants. Il est également important de recueillir les souhaits des personnes désireuses de parler de vie intime, affective et sexuelle, grâce à des questionnaires ou en introduisant ce sujet dans les projets personnalisés par exemple.
Tout cela ne peut se faire sans la sensibilisation de tous et la formation du plus grand nombre. L’accès à une information claire, adaptée et non infantilisante est essentiel pour favoriser l’autodétermination des personnes et faire évoluer certaines représentations. Chez les mineurs par exemple, l’éducation à la vie intime, affective et sexuelle permet d’aborder le consentement ou encore le rapport au corps et ainsi prévenir d’éventuelles grossesses non désirées ou des violences sexistes et sexuelles. La sensibilisation à ces questions doit se poursuivre tout au long de la vie.

Accompagner les personnes en respectant leurs aspirations 

Certaines personnes ne désirent pas être accompagnées dans leur vie intime, affective et sexuelle, d’autres en ont une vision négative, par méconnaissance ou du fait de leur parcours (inceste, agression…) pouvant troubler leur perception des limites corporelles et du rapport à l’autre. Il est ainsi important de proposer un accompagnement personnalisé et adapté à la fois aux souhaits et besoins de la personne, à son rythme, mais aussi à son développement psychique, physique et psychosocial. Le tout, dans un climat de confiance et de bienveillance.

L’approche positive de la vie intime, affective et sexuelle suppose de favoriser les relations (par des activités collectives – inter établissements ou services, par des espaces permettant de recevoir, par un accès à internet, etc.) et d’apporter toutes les clés de compréhension sur des questions fondamentales, comme l’expression du consentement.

Ces premières recommandations apportent un socle commun de repères juridiques et éthiques et des premières pistes d’actions pour travailler collectivement autour de cet enjeu au sein des ESSMS. Un second volet programmé pour l’année prochaine abordera de façon concrète et transversale les outils, interventions et pratiques d’accompagnement.

¹ Ces travaux (volet 1 et 2) n’aborderont pas les questions liées à la parentalité, l’assistance sexuelle et l’accompagnement à la grossesse.

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