Un espace d’intimité créé au sein d’un IME permet aux jeunes d’avoir accès à une vie amoureuse
Article de Natacha Kadur,du 8/12/2020 reproduit à partir du site de France Bleu Lorraine Nord (Lire l’article dans son intégralité : “Un espace d’intimité à l’IME de Montigny-lès-Metz pour permettre aux jeunes d’avoir une vie amoureuse”)
L’institut médico-éducatif (IME) La Horgne à Montigny-lès-Metz propose un espace d’intimité aux jeunes désireux de mener une vie affective et sexuelle malgré leur handicap intellectuel. L’initiative a été distinguée par l’Agence régionale de santé.
Une action que le CeRHeS® promeut depuis plus de 10 ans et qui s’inscrit dans le respect des droits sexuels de tou·te·s
Est ce qu’on peut aller en haut …? ”
C’est ainsi que les jeunes accueillis au centre médico-éducatif de La Horgne à Montigny-lès-Metz se réfèrent à la petite pièce du deuxième étage de leur internat, officiellement baptisée “espace d’intimité”.
L’institut, qui fait partie des 38 établissements du Comité Mosellan pour la Sauvegarde de l’Enfance, de l’Adolescence et des Adultes (CMSEA), accueille 125 jeunes atteints de déficience intellectuelle, âgés de 13 à 25 ans, dont certains y vivent les 365 jours de l’année.
Une demande d’intimité de la part des jeunes
” Nos jeunes vivent dans un espace collectif : la journée ils sont en atelier, leurs seuls moments de détente sont pendant la récréation, donc ils sont toujours en groupe. Parfois ils demandent à avoir un moment intime à deux, sans le regard des autres, c’est ça qui est important pour eux ” , explique Thihang Guittard, l’infirmière qui intervient dans ce protocole.
La “chambre des câlins”, inaugurée en 2016, est le fruit du long travail mené par les équipes éducatives à la suite de ce constat, qui n’est pas allé sans remettre en question leurs propres représentations de la vie affective.
“Avoir des relations sexuelles est un droit établi par l’Organisation mondiale de la santé”
Stéphane Rognon, Directeur de l’IME La Horgne
L’enjeu consistait donc à créer les conditions d’exercice de ce droit dans un cadre digne et respectueux de chaque jeune. “Auparavant nous pouvions être amenés à faire des signalement de comportements chez certains jeunes, qui pouvaient se livrer à des actes sexuels dans des lieux inappropriés. Or, depuis que nous avons autorisé ces actes et crée un lieu dédié, nous n’avons plus à signaler ce type de comportements ” , explique Stéphane Rognon, Directeur de l’IME La Horgne
” Ce qui n’était pas autorisé avant était perçu comme déviant. Pris sur le fait, un jeune pouvait avoir tendance à rejeter la faute sur l’autre, ce qui posait la question du consentement “, abonde Audrey Martin, la psychologue du centre.
15 ans révolus et une capacité à consentir
Pour en bénéficier, ils doivent avoir atteint la majorité sexuelle, fixé en France à l’age de 15 ans. Un binôme formé par une infirmière et une psychologue encadre la démarche. Un entretien doit notamment permettre d’évaluer leur capacité à consentir. ” On ne peut pas évaluer le consentement car il est donné à l’instant, mais on s’assure qu’ils sont capables de dire oui ou non le moment venu“, explique Audrey Martin. L’usage de l’espace d’intimité est également soumis à un réglement : accès strictement limité au couple en ayant fait la demande, règles de bonne conduite dans la pièce, interdiction des violences etc.
“Donner notre autorisation et notre confiance sur l’expression de la vie affective, intime et sexuelle, c’est leur montrer qu’on a confiance en eux”
Audrey Martin, psychologue
30 ans de travail autour de la vie affective
Le projet dépasse le cadre de la simple mise à disposition d’une salle pour Audrey Martin : ” On a pu par exemple leur apprendre certains codes sociaux des relations de couple. Dire par exemple à un jeune : tu vas prendre un petit peu d’argent de poche pour offrir un café à ta copine, aller vous promener en ville tous les deux. Tout ce que font des amoureux classiques. Cela développe plein de compétences pour eux et leur permet aussi d’entrevoir la vie affective de façon beaucoup plus globale. ”
Label de défense des droits
Après quatre années de mise en œuvre réussie, le projet vient d’être labellisé par l’Agence Régionale de Santé du Grand Est parmi les initiatives de “défense des droits des usagers de santé”. Il est selectionné au niveau national dans le cadre d’un concours qui repère et valorise les bonnes pratiques d’appropriation des droits par les acteurs des secteurs sanitaire, social et médico-social.
Cette récompense leur attribue une dotation financière mais représente surtout une reconnaissance du travail accompli par les équipes de la Horgne. Stéphane Rognon espère ainsi ouvrir la voie à d’autres acteurs médico-sociaux pour qu’ils se saisissent du dispositif, notamment dans les foyers pour adultes.
Sur le site de France Bleu : Un espace d’intimité à l’IME de Montigny-lès-Metz pour permettre aux jeunes d’avoir une vie amoureuse…