Handicap et sexualité : lever les freins et les préjugés

Handicap et sexualité : lever les freins et les préjugés

Une Agora pour discuter de handicap et de sexualité

Les élus d’Harmonie Mutuelle et Harmonie Santé proposent le 17 octobre 2024, à 18 h 30, une Agora autour de la thématique « Vie affective et sexuelle en situation de handicap : osons en parler ! ». L’objectif est de casser les tabous sur la sexualité et le handicap, de décomplexer et de conseiller les professionnels qui accompagnent les personnes en situation de handicap. Il s’agira aussi de répondre aux questions que chacun peut se poser.

Trois intervenants témoigneront et ouvriront la discussion : François Crochon, sexologue clinicien, formateur, conférencier et président du Centre de Ressources Handicaps et Sexualités (CeRHeS), Sandrine Carême, sexologue, formatrice et conférencière en santé sexuelle et Maylis Mignot, éducatrice spécialisée au centre Ressources Intimagir Occitanie. La participation à l’Agora a lieu en distanciel. 

La vie amoureuse et la sexualité des personnes en situation de handicap sont encore des sujets considérés comme tabous. Ils sont difficiles à aborder dans notre société.

La vie amoureuse et la sexualité des personnes en situation de handicap sont encore des sujets considérés comme tabous. Ils sont difficiles à aborder dans notre société.

Une vie sociale active, ainsi qu’une vie affective et sexuelle épanouie, contribuent à la santé et au bien-être de l’individu. Cela lui apporte, entre autres, équilibre et confiance, tout en apaisant les tensions et le stress. Aborder certains de ces thèmes, dont les bienfaits sont reconnus, reste cependant encore tabou. C’est le cas pour la sexualité. Et ça l’est d’autant plus lorsqu’elle est associée au handicap.

« En France, on parle beaucoup de sexe mais peu de sexualité contrairement à d’autres pays européens », estime François Crochon, sexologue clinicien, président du Centre de Ressources Handicaps et Sexualités (CeRHeS). Alors accoler ensemble les deux termes que sont sexualité et handicap « est encore plus complexe ». La sexualité est trop souvent réduite à la génitalité (1) et à la procréation. « Alors que dans le cadre d’une approche intégrative et positive, elle s’inscrit au carrefour des dimensions somatique, biologique, sociale et psycho-affective. »

La représentation sociale et idéalisée d’un corps humain jeune et en bonne santé n’arrange rien à ce constat. « L’image de la sexualité des personnes en situation de handicap ne correspond pas aux normes et codes imposés par notre société, souvent discriminatoires et non inclusifs », souligne Sandrine Carême, sexologue, formatrice et conférencière en santé sexuelle. Ces difficultés font écho à celles déjà vécues par les personnes en situation de handicap dans leur intégration à l’école ou dans le monde du travail.

Une Agora pour discuter de handicap et de sexualité

Les élus d’Harmonie Mutuelle et Harmonie Santé proposent le 17 octobre 2024, à 18 h 30, une Agora autour de la thématique « Vie affective et sexuelle en situation de handicap : osons en parler ! ». L’objectif est de casser les tabous sur la sexualité et le handicap, de décomplexer et de conseiller les professionnels qui accompagnent les personnes en situation de handicap. Il s’agira aussi de répondre aux questions que chacun peut se poser.

Trois intervenants témoigneront et ouvriront la discussion : François Crochon, sexologue clinicien, formateur, conférencier et président du Centre de Ressources Handicaps et Sexualités (CeRHeS), Sandrine Carême, sexologue, formatrice et conférencière en santé sexuelle et Maylis Mignot, éducatrice spécialisée au centre Ressources Intimagir Occitanie. La participation à l’Agora a lieu en distanciel. 

Des stéréotypes négatifs dont souffrent les personnes en situation de handicap

Pourtant, il n’est pas nécessaire d’être « valide » pour ressentir des émotions, pour éprouver du désir et exiger le respect de son intimité. « Nous sommes toujours face à des préjugés et des stéréotypes du style : les personnes en situation de handicap seraient trop vulnérables. Elles agiraient comme des enfants incapables de prendre des décisions pour leur bien-être », observe François Crochon qui recommande de se départir d’une « vision médicale et paternaliste du handicap » comme le préconise l’ONU.

En août 2021, en effet, des inspecteurs de l’organisation internationale ont auditionné la France sur les progrès de sa politique menée en faveur des personnes en situation de handicap et sur le respect de la convention internationale relative aux droits des personnes handicapées des Nations unies. Ils ont pointé du doigt les stéréotypes négatifs dont souffre ce public.

Selon François Crochon, il est nécessaire de changer de discours « afin que les personnes en situation de handicap ne soient plus vues comme des objets de soin mais comme des sujets de droits effectifs et de désir ».

Le sexologue clinicien rappelle que malgré la déficience, il est possible « de vivre une vie affective et sexuelle heureuse ». Lorsqu’il y a des limitations, des empêchements liés au handicap, « il existe des palliatifs sous forme d’aides médicamenteuses, techniques ou humaines pour pouvoir accéder à ces émotions de la vie comme tout un chacun ».

Ne pas reconnaître la sexualité des personnes handicapées revient à nier leurs émotions

Une autre idée reçue, réductrice, vient entacher le principe du droit et du respect de la vie intime des personnes en situation de handicap : celle d’une supposée désinhibition sexuelle des personnes cérébrolésées (2). « Les chiffres indiquent que seulement 20 % d’entre elles sont désinhibées. 20 % sont, à l’inverse, inhibées sexuellement. Tandis que les 60 %, soit la majorité de ces personnes, réagissent comme n’importe qui d’autre », précise François Crochon.

Le tabou de la sexualité des personnes en situation de handicap est un manque de reconnaissance de leurs émotions et plus généralement de leur existence. Il peut engendrer de la souffrance, la perte de l’estime de soi, un sentiment d’infériorité, un choix non délibéré d’absence de vie intime, des tensions au sein des établissements comme des familles. « Certains individus vont penser que leur handicap leur interdit toute vie sexuelle et ne vont pas oser la vivre », déplore Sandrine Carême. D’autres vont assumer pleinement leur sexualité sans tenir compte, à juste titre, des pressions extérieures excluantes. « Beaucoup de couples se forment dans les établissements ».

C’est pourquoi, il est important de ne pas stigmatiser et de permettre à chacun de mener sa vie intime comme il l’entend. « Par exemple, imposer la pilule à toutes les femmes qui arrivent en institution, par souci de prévention et de protection, n’est pas une solution », commente la sexologue. Le cadre doit être plus souple et privilégier l’autodétermination dans le choix contraceptif. « L’institution est au carrefour du devoir de protection des individus et de la vie en collectivité mais aussi du respect des libertés et des droits des personnes accueillies ».

Former et informer pour faire changer le regard

L’obstacle majeur tient au fait qu’en France, l’éducation la plus complète à la sexualité auprès des plus jeunes fait défaut. Éducation qui devrait être continue pour évoluer avec son temps. « Elle est à faire auprès de tous les citoyens mais aussi des professionnels qui accompagnent les personnes en situation de handicap en établissements comme à domicile », précise Sandrine Carême. Même s’il peut être tabou pour les aidants, quand il s’agit des parents de la personne concernée, d’être confrontés à la sexualité de son enfant.

Former et informer contribuent à faire changer le regard sur autrui. « Les médias ont un rôle à jouer dans ce processus. Si les séries et les films mettaient plus en avant les personnes en situation de handicap dans leur vie quotidienne, cela normaliserait ce qui nous bloque sans raison valable », reprend la sexologue, formatrice et conférencière en santé sexuelle.

De plus en plus d’établissements et de services prennent en compte la dimension affective et sexuelle de la vie des personnes en situation de handicap. Des ateliers, des séances d’éducation et d’information (par exemple sur le consentement ou encore la connaissance du corps), ainsi que des rencontres individuelles sont mis en place pour les résidents et leurs accompagnants dans lesquels des sexologues ou d’autres structures habilitées interviennent.

(1) Ensemble des caractères et activités liés aux organes génitaux.
(2) Par personnes cérébrolésées, on entend que ces personnes souffrent d’atteinte cérébrale acquise après un traumatisme crânien, des accidents vasculaires cérébraux, des tumeurs cérébrales, des malformations artérioveineuses ou des maladies dégénératives évolutives.

La loi et la liberté sexuelle des personnes handicapées

Selon le droit français, chacun peut mener la vie intime, affective et sexuelle qu’il désire sous réserve d’un consentement réciproque et du respect de la loi. Cette liberté concerne également et pleinement les personnes en situation de handicap. Ne pas tenir compte, ne pas respecter ou priver ces dernières d’une vie intime, affective et sexuelle, notamment en institution, est une violence et une discrimination.

La circulaire du 5 juillet 2021 rappelle ces droits et ces devoirs s’agissant des personnes accompagnées par des établissements ou services sociaux ou médico-sociaux. Par ailleurs, ce texte législatif entend lutter contre les violences physiques, psychologiques et sexuelles dont les personnes en situation de handicap peuvent faire l’objet. Un travail initié par la Haute autorité de santé est en cours afin d’établir des recommandations de bonnes pratiques professionnelles pour un meilleur respect de la vie intime des personnes en situation de handicap.

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