Le CESE se mobilise → Éduquer à la vie affective, relationnelle et sexuelle : passer de l’obligation à l’application !

Le CESE se mobilise → Éduquer à la vie affective, relationnelle et sexuelle : passer de l’obligation à l’application !

L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) vise à générer des rapports humains de qualité, des relations égalitaires dénuées de sexisme et de préjugés, pour construire une société plus inclusive. 

Le Conseil économique, social et environnemental a adopté mardi 10 septembre 2024 son rapport et son avis « Éduquer à la vie affective, relationnelle et sexuelle » présentés par Cécile Gondard-Lalanne (Groupe Alternatives sociales et écologiques) et par Evanne Jeanne-Rose (Groupe des Organisations étudiantes et des mouvements de jeunesse).

L’avis a été adopté en séance plénière le mardi 10 septembre 2024 avec 119 voix pour et 19 abstentions.


C’est quoi l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle   ?

L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) participe de l’émancipation des jeunes. Elle les aide à connaître leurs droits et à respecter ceux des autres, à poser des limites, à respecter leur propre corps et celui d’autrui. Elle vise à générer des rapports humains de qualité, des relations égalitaires dénuées de sexisme et de préjugés, pour construire une société plus inclusive. 
 

🔎 La loi Aubry du 4 juillet 2001 pose un cadre : l’éducation à la sexualité en milieu scolaire est une obligation légale à raison d’au moins trois séances annuelles dans les écoles, les collèges et les lycées. Pourtant, cette loi suivie de nombreuses circulaires reste largement inappliquée


L’éducation à la sexualité, telle que définie par le ministère de l’Education nationale, comporte en réalité trois volets égaux dans leur importance : la dimension affective, la dimension relationnelle et la dimension sexuelle.
 

🔹L’éducation affective se concentre sur le développement du lien de confiance entre une personne et son environnement le plus proche, générant la confiance en soi

🔹L’éducation relationnelle aborde les relations interpersonnelles mais aussi des sujets plus vastes comme l’égalité entre les individus, les stéréotypes de genre, la prévention des violences sexuelles. 

🔹L’éducation sexuelle, elle englobe divers aspects de la sexualité humaine et de la santé sexuelle. Elle aborde les mécanismes de la reproduction mais aussi les différentes identités de genre, la notion de consentement, le plaisir, dans le but de promouvoir une vision positive de la sexualité, dans le respect des droits et l’autonomie des individus.


C’est pourquoi le CESE a choisi de retenir le terme d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle (EVARS) comportant toutes les dimensions de cette éducation.

« La question que nous nous sommes posée n’est pas SI les enfants ont le droit à de l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle, mais COMMENT le leur garantir. » Agathe Hamel, Présidente de la délégation aux Droits des femmes et à l’égalité.


Moins de 15% des élèves bénéficient d’éducation à la sexualité malgré l’obligation légale

En France, l’éducation à la sexualité a été rendue obligatoire à l’école en 2001, à raison de trois séances annuelles pendant toute la scolarité de l’élève. Mais toutes les enquêtes, à commencer par le rapport de 2021 émanant de l’inspection générale de l’éducation du sport et de la recherche, montrent que cette obligation n’est pas respectée. Pourtant, les jeunes sont en demande de cette éducation. Vouloir les en « protéger », en particulier à l’école, c’est souvent les laisser seuls avec leurs questionnements, sachant par exemple qu’ils et elles seront exposés à des images pornographiques sur un téléphone portable avant l’âge de 10 ans. Il est indispensable de les accompagner. 

 « L’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle est une démarche transversale et progressive qui permet à ‘l’enfant, tout au long de son développement, d’apprendre à se connaitre, à connaitre les autres et à construire des relations permettant d’aller vers plus d’égalité entre les femmes et les hommes » Cécile Gondard-Lalanne, co-rapporteure de l’avis.

L’un des rôles de la société civile organisée, représentée au CESE, est de pouvoir donner l’alerte quand cela est nécessaire. Ce sont près d’un tiers des adolescents (30 %) qui ont déclaré n’avoir utilisé ni préservatif ni pilule contraceptive lors de leur dernier rapport sexuel, d’après un rapport de l’Organisation mondiale de la Santé. Toujours d’après l’OMS, plus d’une femme sur quatre a déjà été victime de  violences physiques ou sexuelles de la part de son partenaire. Ces constats imposent la nécessité d’agir en faveur d’une véritable mise en place de l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle pour toutes et tous.

L’EVARS est avant tout une éducation à l’égalité qui déconstruit les stéréotypes et les normes sociales inégalitaires entre les individus. Il s’agit donc d’un point de convergence entre les droits des femmes et les droits des enfants, L’EVARS peut déconstruire les schémas toxiques, aider à enrayer la montée des violences sexuelles, du sexisme, des LGBTQIAphobies et contribuer à une meilleure prévention des maladies sexuellement transmissibles et de la transmission du VIH pour lesquels les connaissances de jeunes sont en net recul depuis plusieurs années. À l’école, elle peut amener au repérage d’enfants victimes d’abus sexuels.


Adopter une posture « à hauteur d’enfant »

Plus globalement, ce sont les rapports entre adultes et enfants qui sont aussi questionnés : la délégation aux droits des femmes et à l’égalité en charge de ce projet d’avis met en lumière les liens entre droits de l’enfant et droits des femmes. Notre pays reste baigné par la culture de l’infantisme, qui désigne un ensemble de discriminations et de préjugés dirigés contre les enfants, les adolescentes et adolescents, uniquement en raison de leur « statut d’enfants ». Cette culture qui, comme le sexisme, imprègne la société tout entière, doit faire l’objet d’un examen critique pour être mise à distance.

Adopter une posture « à hauteur d’enfant » est nécessaire pour partir de leurs besoins fondamentaux et construire des politiques qui soient tout à la fois protectrices et émancipatrices.

Le 12 juin dernier la DDFE a organisé un événement qui s’intéressait particulièrement aux droits de l’enfant en posant la question : les enfants sont-ils des sujets ou des objets de droit ?

Dans cette optique, la participation citoyenne a enrichi les réflexions de cet avis, via des contributions écrites d’organisations, d’associations, d’institutions, et de professionnelles et professionnels agissant dans le champ de l’EVARS. En complément, des questionnaires ont été mis en ligne à destination des professionnelles et professionnels dans les champs scolaires et hors scolaires, et des jeunes de moins de 25 ans. Une journée délibérative sollicitant les principales organisations impliquées a également été organisée et a permis de dégager plusieurs préconisations.

 « Il s’agit de se mettre à hauteur d’enfant, de partir de leurs droits, de leurs besoins et de leurs expressions personnelles ou collectives. C’était le sens de notre démarche de participation citoyenne ouverte de façon nouvelle pour le CESE pour les enfants et les jeunes, à titre individuel ou collectif. » Evanne Jeanne-Rose, co-rapporteur de l’avis.


Les préconisations pour rendre effectif le droit à l’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle

Ce sont 23 préconisations qui ont été formulées par le CESE pour rendre réellement effectif le droit des enfants et des jeunes à bénéficier d’éducation à la vie affective, relationnelle et sexuelle :

→ Pourquoi ? L’enfant est un sujet de droits mais cette réalité est souvent occultée. Pour devenir effectifs, les droits des enfants doivent être reconnus d’abord au plus haut niveau de l’État, et connus par tous et toutes, à commencer par les enfants eux-mêmes, les familles, et les personnes qui les accueillent et les accompagnent. L’école a une mission particulière à cet égard.
→ Comment ? En affichant les droits des enfants et interdits à leur égard dans tous les lieux qu’ils et elles fréquentent, en inscrivant ces droits dans les référentiels métiers des professionnelles et professionnels encadrant les enfants. 
En tenant des permanences régulières d’espaces de vie affective, relationnelle et sexuelle dans les endroits fréquentés par les jeunes, dont l’école, le collège, le lycée et les centres de formation d’apprentis. 
En intégrant l’EVARS dans un enseignement obligatoire des compétences psychosociales et de l’égalité à l’école dont le volume horaire annuel devra être d’au moins 30h dès le collège.
 

→ Pourquoi ? La famille est le premier lieu de socialisation des enfants. Le soutien à la parentalité consiste à accompagner les parents dans leur rôle de premiers d’éducatrices et d’éducateurs de leurs enfants, par l’écoute, les conseils et l’information.

→ Comment ? En renforçant le soutien à la parentalité au-delà du cadre médicosocial en proposant systématiquement aux parents des rendez-vous individuels autour des besoins et des droits de l’enfant (intimité, éducation…), à plusieurs étapes clefs de la vie de l’enfant (naissance, entrée en maternelle, entrée au collège).

→ Pourquoi ? Tous les lieux de socialisation des jeunes sont des espaces dans lesquels elles et ils construisent leurs liens affectifs, relationnels et parfois sexuels. C’est pourquoi l’EVARS doit faire l’objet de politiques publiques cohérentes interministérielles impliquant un grand nombre d’administrations, et au premier chef le ministère de l’Éducation nationale et de la jeunesse.

→ Comment ? En créant un plan de formation EVARS proposant une formation unique élaborée en concertation avec l’ensemble des parties prenantes sur les besoins et droits fondamentaux de l’enfant ; En créant une incrimination pénale sanctionnant l’entrave au droit des enfants à bénéficier d’une EVARS.

Partager cet article